Schweitzer Fachinformationen
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Pendant des années j’ai essayé d’éluder la question, je m’en rends bien compte maintenant. Moi, qui suis généralement connue pour savoir prendre des décisions rapides et cohérentes !
À présent, assise ici au bord de la mer, je le voyais clairement : il y avait dans ma vie un vide majeur que j’avais superbement ignoré. Les vagues de l’Atlantique s’avançaient en grondant, ça faisait déjà trois jours que j’étais assise ici. Que me voulait ma vie ? Et qu’avais-je à offrir ? Les palmiers chantaient au vent comme au cinéma.
Pourtant tout allait bien dans ma vie. Ma librairie au nord de l’Allemagne marchait à merveille, mes nombreux apprentis m’apportaient beaucoup de joie. Mon fils John était désormais assez grand pour prendre sa vie en main. J’avais eu pas mal d’hommes dans ma vie, j’avais aussi de bons amis. Alors pourquoi n’arrivais-je pas à m’en réjouir ? J’écoutais de la belle musique, j’avais de belles motos, je pouvais travailler dans mon magnifique jardin, voyager où je voulais et manger ce qui me plaisait. Que vouloir de plus ?
Beaucoup de femmes m’avaient dit combien elles m’enviaient, elles voyaient en moi la personnification de l’émancipation. Je me souciais peu de ma réputation, j’ai divorcé trois fois et payé moi-même les frais. Bien que vivant dans une petite ville de province, j’avais épousé un Africain. Au début, cela a fait fuir quelques clients, mais lorsqu’ils se sont rendus compte que rien n’avait changé, ils sont revenus. En tout cas, j’ai beaucoup profité de la vie !
Mais quelque part, il y avait un manque dans ma vie. J’avais toujours été très soucieuse de la vérité et de l’honnêteté envers les autres, et envers moi-même, mais quelque chose avait dû m’échapper, quelque chose de très important.
Une nouvelle vague vint s’échouer sur la plage, je me sentais triste. Où était passée ma joie de vivre ?
1989 a été l’année de mon premier voyage en Afrique. Avant cette date, lors de mes nombreux voyages, j’avais toujours évité ce continent sombre : trop dangereux pour m’y risquer seule, trop complexe pour le comprendre tant soit peu. Je ne voulais pas courir ce risque.
Mais un jour, un demandeur d’asile de notre ville échoua au Service psychiatrique. J’étais à l’époque membre de l’association Amis des Demandeurs d’Asile, et nous allions lui rendre visite à tour de rôle.
Il allait mal. À chaque fois, nous le retrouvions ligoté au lit, ou en camisole de force, de jour en jour il devenait de plus en plus gris et maigre. Nous avons essayé de convaincre son médecin de se mettre en rapport avec des médecins en France ou en Belgique, pensant que le traitement d’un Africain avec une culture et une tradition si différentes devait être autre que celui d’un Allemand ! Dans ces pays, on avait déjà plus d’expérience avec des Africains devenus « fous ». Mais la femme médecin refusait toute aide.
En Afrique de l’Ouest, on attache beaucoup d’importance au vol des oiseaux.
Un jour, le docteur fit venir le jeune homme pour une entrevue dans la salle de soins au quatrième étage. Lorsqu’il entra dans la pièce, une volée d’oiseaux passa devant la fenêtre. Il se précipita à la fenêtre pour interpréter le vol, mais, pensant qu’il voulait se jeter par la fenêtre, le médecin appuya sur le bouton rouge. Les gardes accoururent pour l’attacher à nouveau au lit, et lui administrer une fois de plus des calmants. Encore un malentendu entre deux cultures différentes.
Cela ne pouvait pas continuer ainsi. Par chance, j’ai réussi à avoir au téléphone un de ses frères qui travaillait dans une sucrerie au sud du Burkina Faso. Il était fermement convaincu qu’on pourrait guérir son frère avec la médecine traditionnelle. Il s’agissait sans doute d’un sortilège et dans son ethnie, on disposait de moyens pour y remédier. Je devais venir chercher les médicaments traditionnels.
Que faire ? Je rentrais de voyage et n’avais ni le temps ni l’argent pour repartir en Afrique. En plus, je n’en avais aucune envie. Nulle part dans le monde, les voyages en avion ne sont aussi chers qu’en Afrique. De plus, mon agence de voyage ne connaissait même pas Ouagadougou, la capitale, qui n’avait jamais entendu un mot pareil ? Où était-ce ? Au Sahel ?
Il y eut tant de résistance, que je finis par accepter le défi : j’ai acheté un billet pour Banjul en Gambie, c’était ce qu’il y avait de moins cher à l’époque. J’ai étudié la carte de l’Afrique de l’Ouest et me suis dit : les 2 000 kilomètres de Banjul à Banfora dans le sud du Burkina Faso sont certainement faciles à parcourir. Les frontières ? Avec mon expérience des voyages, je n’y voyais pas de problèmes.
En tant que novice je n’avais aucune idée, je ne savais rien de la guerre au Mali, ni des bandits dans les trains, ni des attaques nocturnes, ni des terribles accidents de minibus surchargés sur les pistes de brousse, ni des maladies graves à vaincre sans soins médicaux, ni des nombreux escrocs professionnels et des petits voleurs. Aujourd’hui je sais : les voyages en Afrique doivent être préparés avec soin, personne ne sait si et quand on va arriver, et surtout dans quel état ! Même avec la meilleure voiture, avec deux roues de rechange, des réservoirs supplémentaires de gasoil et d’eau et la boussole à portée de main, il peut toujours arriver quelque chose. Ce continent est tellement gigantesque, que l’on peut s’y perdre.
Chez moi tout le monde me déconseillait ce voyage, mon mari n’était pas d’accord, mon fils avait peur pour moi. J’en dis le moins possible à ma mère et après une orgie de vaccins, je me mis en route.
L’Afrique ! Encore aujourd’hui, je me souviens de ma solitude soudaine à l’aéroport de Banjul, à 02 heures du matin. Les bus attendaient les touristes pour les transporter dans les hôtels en bord de plage. Comment pouvais-je rejoindre la ville ? En fait, j’étais là une proie facile pour tout escroc, mais j’ai eu de la chance. Quelqu’un m’a emmenée et déposée devant un petit hôtel louche, c’était un hôtel de passe, les prostituées étaient assises sur les marches et se moquaient royalement de moi. Les souris couraient sous mon lit, les pigeons avaient fait leur nid dans la climatisation cassée. Et pendant toute la nuit les femmes couraient le long des couloirs, frappant à toutes les portes en criant : « Monsieur, c’est l’amour qui passe. » Comme je ne pouvais évidemment pas dormir, nous avons bavardé le reste de la nuit.
Le lendemain matin, j’ai assisté à mon premier lever de soleil en Afrique. Je voyais la saleté et la pauvreté, mais aussi des visages joyeux et je n’arrivais pas à comprendre cette joie de vivre générale. De bonne grâce, on partagea le thé avec moi, car je n’avais pas encore d’argent gambien. Une assiette de riz indéfinissable était devant moi. Après un regard hésitant jeté à la ronde, j’ai commencé à manger avec autant de plaisir que mes autres amies de cette nuit-là. Cela ne m’a pas fait de mal et j’ai appris à connaître, ce matin-là et pour toujours, ce qu’est le partage absolument naturel qui est de rigueur en Afrique.
C’est ainsi que commença ce voyage dans un continent inconnu. Les couleurs, le charme des gens, leur gentillesse et leur modestie me rendaient heureuse. Jamais je n’avais voyagé avec autant d’insouciance ! Et d’une manière étrange, les pires difficultés se transformaient toujours en bénédictions, tout finissait toujours par s’arranger, à chaque problème il y avait une solution. J’affrontais ce nouveau monde l’esprit ouvert, sans réserve, les Africains apprécient et sont toujours prêts à venir en aide.
Au début, j’ai dû m’habituer à cette manière de voyager, avec un empressement typiquement européen, je me hâtais le matin aux diverses gares routières ou arrêts de bus d’où partaient les célèbres taxis de brousse dans différentes directions. Il fallait marchander le prix du voyage. J’ai mis des jours à comprendre que les conducteurs me mentaient d’une manière éhontée. « Pas de problème, oui, bien sûr Madame, nous partons tout de suite, dans cinq minutes ! » Les cinq minutes se transformaient souvent en cinq heures, car un taxi de brousse part seulement quand il est plein, et plein veut dire surchargé. On arrive toujours à y faire entrer deux ou trois personnes de plus, des moutons, des mobylettes, des paniers de légumes ou des régimes de bananes. Durant le voyage et à force d’être secoué tout cela finit par trouver sa place ! Que signifie le temps en Afrique ? Du temps, il y en a toujours, un proverbe dit : « Le temps y en a toujours plus. »
Je me fâchais rarement, car ces arrêts étaient pleins de vie et de merveilles pour moi. Partout il y avait de la musique, de belles couleurs et des énigmes. Qu’importe l’endroit où on me dépose en Afrique de l’Ouest, je ne m’y suis encore jamais ennuyée. Il se passe toujours un tas de choses, et je participe à cette vie !
On trouve toujours des gens qui ont envie de raconter leur vie. Il y a souvent des malentendus amusants, en ce qui concerne la raison et le but du voyage et il faut s’expliquer, on boit du thé, on distribue de l’aspirine et de la nourriture. On échange des recettes de cuisine, on compare les maladies, on discute des articles de journaux, tout dépend des voisins, de la langue que...
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