Un enfant quand je veux ?

Ma première visite en province

Province de Nghê An
Ville de Vinh

1994

M.

La province de Nghe An est située au centre du pays. Je place la visite à la ville de Vinh au début de mes activités TQS, car ce fut elle qui a déterminé toute la suite de mon action. Ce déplacement à Vinh s'est en effet situé au temps où j'explorais les possibilités d'action en faveur de TQS. Dans le même temps, les autorités de santé tentaient de comprendre ma démarche.

La VINAFPA nous emmena à Vinh.

C'était ma première visite pour TQS en province.

Départ de Hà Nôi jeudi à 6h30 après un délicieux petit déjeuner avec le traditionnel pho bo à côté du petit lac. Nous étions tous deux, Tiêu et moi dans une superbe Toyota Corolla avec un chauffeur, pour les 8 heures de route entre Hà Nôi et Vinh.

Nous avons été accueillis par les responsables de la planification familiale : le docteur Hoang Ky, président de la VINAFPA de la province de Nghe An, et le Docteur Vo Thuy Phuong, vice président et directeur du centre de P.M.I. de la ville.

La province de Nghe An, située au centre du pays est la troisième province par la taille, et une des plus pauvres. Elle avait été séparée de la province de Ha Thin avec laquelle elle formait la province de Nghe Thin. Elle comportait une importante minorité catholique. Vinh est un port à l'embouchure de Sông Cà (la rivière des poissons).

Le Centre de P.M.I. de la ville assurait tout ce qui concourt à la « protection des mères et des enfants » : surveillance des femmes enceintes, prévention des difficultés obstétricales, vaccinations, et bien sûr la planification familiale.

En 1993, dans la ville de Vinh, 50.000 femmes portaient un stérilet, 15.000 étaient utilisatrices de pilule, 18.000 utilisaient le préservatif, 4.200 stérilisations masculines ou féminines avaient été faites (500 en 1992). Dans chaque centre visité, il y avait une petite salle d'opérations, souvent cadeau d'ONG étrangères, plus ou moins bien équipée vis à vis de l'hygiène, pour la pratique de la ligature des trompes chez les femmes et du canal déférent chez les hommes. Environ 5% des femmes utilisaient Ogino 9 , seule méthode naturelle connue. Une petite brochure était distribuée expliquant la méthode.

Au cours de mon séjour, j'ai rencontré deux groupes, dans deux communes différentes, composés de responsables de la commune, chargés d'être motivateurs pour la planification familiale. Un interprète du Comité populaire, Nguyên Cong Thang, m'a accompagné pour une visite rapide de la ville de Vinh, du marché, du pont sur le fleuve, du jardin botanique, avant le dîner avec tous les officiels à 17h30 dans l'hôtel.

Dans la soirée j'ai préparé les rencontres du lendemain, tandis que Tiêu travaillait avec les autres.

Le vendredi 8 avril au matin j'étais dans le village de Nghi Phu. J'ai été accueillie par le Président du Comité populaire et le Curé du village, Joseph Vuong Din Ai. Comme dans tout le pays, la direction de la communauté villageoise appartenait au Comité Populaire dont la fonction était voisine de la Mairie chez nous, mais en fait une délégation du Parti communiste. Le curé, comme je l'ai souvent vu, était invité. Il représentait la communauté catholique. Opposé aux méthodes de planification familiale du Parti, il était comme tous les curés et les évêques que j'ai rencontrés, soucieux de la santé des familles et donc de la nécessaire limitation du nombre d'enfants. Mais il n'avait aucune autorité pour l'enseignement de la planification familiale.

Le village avait 11.500 habitants dont 3.400 catholiques, avec une moyenne de 7 enfants par famille. Le Père Joseph avait ouvert une crèche pour 150 bébés de 1 à 4 ans.

Une quinzaine de personnes ont assisté à ma conférence dont 5 catholiques.

J'ai dit d'abord ma joie de rencontrer des frères catholiques. J'ai présenté la position des catholiques face à la planification familiale : non pas un refus, mais un regard différent. Puis j'ai présenté les Méthodes d'Auto Observation.

Les questions posées marquaient l'étonnement : n'est-ce pas trop difficile pour des cultivateurs, cela demande du temps, un niveau économique et intellectuel élevé, est-ce efficace ?

Le médecin du centre de Planification de Vinh était très intéressé, il n'avait jamais entendu parler de la glaire cervicale comme cela. Il m'a demandé de venir parler à ses médecins et sages femmes le samedi matin avant de repartir.

Le vendredi après midi, j'étais dans le district de Hung Nguyên. District de 118.000 habitants, 23 communes, très agricole. Statistiques habituelles avec 1,8% d'accroissement annuel de la population, mais 3% dans certains villages. Les familles étaient nombreuses, 36% avaient plus de 3 enfants.

Le grand souci des responsables était d'arriver à ce que l'information et l'éducation à la planification familiale puissent atteindre toutes les familles.

J'ai visité ensuite la commune de Hung Tay : 8.800 habitants dont 65% de catholiques.

Revenu agricole moyen : 45.000 dong (4,5 US $) par mois et par habitant. La production agricole ne pouvait pas nourrir tout le monde, l'accroissement de la population était plus rapide (>3%) que celui de la productivité.

Nous sommes arrivés dans ce village dans un cortège de 4 voitures flambant neuves, avec tous les responsables du district.

Le nombre des enfants m'a impressionnée : dans les maisons au bord de la route, maisons de briques ou paillottes, cachées derrière une haie de bambous, il n'était pas rare de voir jouer 3 ou 4 petits enfants, les plus grands étaient à l'école.

Une grande salle du Comité Populaire nous a accueillis. Une vingtaine de personnes étaient venues m'écouter, en grande majorité des hommes, seulement 5 femmes cachées dans le fond.

À cette assistance de personnes officielles, de nombreux curieux de passage se sont glissés sous la véranda : des hommes, des femmes, les chauffeurs, des militaires, etc... Au milieu de l'après-midi, une bande d'enfants est arrivée dans les parages, comme une volée de moineaux, attirés par les autos. Je saurai le soir que leur institutrice, apprenant qu'il y avait une conférence intéressante au Comité Populaire, avait lâché ses élèves pour venir m'écouter.

J'ai fait à peu près le même exposé que le matin. L'intérêt semblait très grand. Le représentant des catholiques dit avoir reçu des indications et des brochures sur les méthodes naturelles, mais pas très claires, et surtout personne n'était formé pour l'enseignement de ces méthodes et il le déplorait.

Samedi 9 avril au matin, comme convenu, j'étais au Centre de Planification Familiale de la ville de Vinh. Une vingtaine de médecins et sages femmes travaillant en planification familiale y étaient réunis. Mon exposé a porté essentiellement sur les signes de la fertilité, et surtout sur la glaire cervicale. Exposé un peu plus technique que la veille, puisque s'adressant à des professionnels de la santé.

Au retour de ce voyage, j'ai fait avec Tiêu des projets pour la suite de notre travail commun.

Il nous a semblé que le travail de sensibilisation aux MAO que nous faisions depuis plusieurs années pouvait déboucher maintenant sur des formations plus approfondies permettant de diffuser une réelle possibilité d'utilisation de ces méthodes avec le maximum d'efficacité.

Tiêu voyait grand. Une organisation intéressant « les masses », méthode habituelle dans ce pays au dirigisme d'Etat. Il m'a demandé de réaliser un film vidéo d'enseignement des MAO, de la même façon que Jean-Bernard avait réalisé un film sur l'enseignement des soins aux nouveau-nés asphyxiques « La vie entre les mains ». La vidéo était alors un moyen nouveau très apprécié au Viêt Nam, et qui permettait une diffusion importante.

Il n'y a pas eu de suite.

De mon côté, j'ai proposé...