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La marche générale de la Révolution de 1848 en France est à la fois particulière et très simple. D'ordinaire, une révolution présente dans son cours une courbe ascendante et une courbe descendante. C'est ainsi que le 9 thermidor marque dans la première Révolution française la fin du mouvement en avant et le commencement du retour en arrière. Ici rien de pareil. Le point culminant est atteint dès le début. Il se livre, durant quelques semaines, une lutte indécise entre les forces qui veulent maintenir la France à ce niveau et celles qui tendent à lui faire redescendre la pente gravie en trois jours. Cette lutte de forces est, au fond, une lutte de classes, qui se révèle dès les premiers instants, s'envenime bientôt en conflits aigus et donne leur sens aux « journées » échelonnées de mois en mois avec une étrange régularité : 25 février, 17 mars, 16 avril, 15 mai, 22 juin. Pendant ces quatre mois chacune des deux classes et des deux tendances opposées l'emporte tour à tour ; mais chaque victoire éphémère et incomplète de l'une est suivie d'une revanche de l'autre, jusqu'au moment où, dans le sang de la guerre civile, la classe et la tendance bourgeoises triomphent de la classe et de la tendance populaires. Dès lors, la réaction victorieuse se précipite et, de chute en chute, fait retomber le peuple et la bourgeoisie elle-même au-dessous du point d'où ils étaient partis à la conquête de la République Mais, malgré l'inutilité apparente de l'effort avorté, il y a des choses abattues qui ne se relèvent pas, des progrès réalisés qui subsistent, des idées lancées qui continuent leur mouvement à travers le monde.
Le 24 février 1848, pendant que Paris gronde, fume, bouillonne encore comme un volcan en éruption, la première affaire à régler entre les vainqueurs surpris par la facilité de leur victoire, « arrivée, suivant l'expression de Gabet, comme une bombe ou un éclair », est la constitution du nouveau gouvernement. Sera-ce la Régence ou la République ? Une bonne partie de la bourgeoisie se fût sans aucun doute accommodée d'un changement se bornant à mettre la couronne sur une autre tête. Les républicains modérés croyaient la République prématurée. L'avocat Marie, un des chefs de l'opposition sous Louis-Philippe, disait : « Son temps n'est pas venu. Je l'aime trop pour souhaiter qu'elle naisse avant terme. » Béranger a écrit plus tard : « Nous voulions descendre marche à marche ; on nous a fait sauver un étage. » Mais il fallait compter avec les combattants des barricades qui n'entendaient pas qu'on renouvelât ce qu'ils appelaient l'escamotage de 1830. Déjà le peuple célébrait à sa façon les funérailles de la royauté, en brûlant les voitures de gala et le trône avec une allégresse gouailleuse. A la Chambre, la Régence disparaissait avant d'avoir existé ; la duchesse d'Orléans, le duc de Nemours suivaient Louis-Philippe sur le chemin de l'exil, et l'on décidait de nommer un gouvernement provisoire.
Une liste est alors soumise en plein tumulte, je ne dirai pas au vote de l'Assemblée (car il n'y a plus, à proprement parler, d'Assemblée), mais à l'approbation de la foule bigarrée qui se presse dans la salle envahie. Lamartine, Arago, Ledru-Rollin sont nommés par acclamation ; avec eux passe sans encombre Dupont de l'Eure, le patriarche de la démocratie, dans la vénérable majesté de sa quatre-vingt-deuxième année. Marie, Crémieux, Garnier-Pagès sont acceptés malgré des contestations assez vives. Le nom de Louis Blanc, le socialiste, prononcé par quelques voix, est volontairement omis par Lamartine qui aide à dresser la liste.
Mais il existe une tradition révolutionnaire, une sorte de cérémonial réglé d'avance. Le Gouvernement provisoire, après ce simulacre d'élection parlementaire, doit aller à l'Hôtel de ville se faire reconnaître et, pour ainsi dire, sacrer par le peuple. Il se trouve là en présence d'un courant venant d'ailleurs, d'une autre liste émanant de la presse avancée et des sociétés secrètes. On discute. Un semblant d'élection, dans la salle Saint-Jean, aboutit à la réunion des deux listes rivales. Marrast, Flocon, Louis Blanc, qui représentent le National et la Réforme, Albert, un ouvrier mécanicien qui a quitté la veille sa blouse et ses outils de travail, et qui est le candidat des sociétés secrètes, sont adjoints aux députés déjà désignés. Les trois derniers élus reçoivent, ou plutôt subissent d'abord, le titre de secrétaires, et, dans les premières séances, on oublie de convoquer Albert.
Ainsi se trahit, dès l'origine, une sourde dissidence entre les onze hommes qui se chargent de présider aux destinées de la France. On peut distinguer parmi eux trois groupes divers. Le plus nombreux comprend les républicains modérés, ceux qui considèrent la révolution comme accomplie, du moment que la monarchie censitaire et la Chambre des Pairs ont été balayées par la nation. Ce sont : Dupont de l'Eure, Arago, Crémieux, Garnier-Pagès, Lamartine, Marie et Marrast. Le plus avancé se compose des républicains socialistes Albert et Louis Blanc, partisans déclarés d'une profonde transformation économique. Entre ces deux extrêmes se placent, poids mobile oscillant de droite à gauche, des radicaux, des démocrates. Flocon, Ledru-Rollin, qui veulent très sincèrement des réformes sociales sans trop savoir lesquelles, mais qui n'entendent pas qu'on touche à la constitution de la propriété et au régime du salariat.
Les premiers correspondent à cette partie moyenne, instruite et aisée de la bourgeoisie, qui se sent majeure et capable de diriger, sans roi, sans cour et sans nobles, les affaires publiques ; les derniers résument en eux les velléités frondeuses et vaguement humanitaires des petits bourgeois, des petits boutiquiers, des petits artisans qui souffrent des impôts mal assis, des inégalités consacrées par la loi et accrues par le développement du grand commerce et de la grande industrie, mais sans être réduits à la condition précaire des travailleurs contraints de louer leurs bras pour vivre. Les autres, enfin, sont les porte-voix de la classe ouvrière proprement dite et de ses aspirations imprécises, mais nettement orientées vers un régime plus égalitaire qui doit s'établir par l'association des hommes et la socialisation des choses. Tous, d'ailleurs, reflètent les opinions et représentent les intérêts des villes, non des campagnes.
Gouvernement de concentration, gouvernement de compromis, hétérogène et discordant, capable de s'entendre sur quelques points d'un programme restreint, condamné, dès qu'il se présentera une question brûlante, à des tiraillements sans fin, à des défiances mutuelles, à des débats violents, à des solutions équivoques et bâtardes ! Amalgame d'éléments contraires, qui peut être bon pour la résistance à des ennemis communs et pour une époque rassise, mais qui l'est beaucoup moins pour l'action et pour un moment révolutionnaire ! Éclectisme périlleux qui paralyse les initiatives hardies, empêche toute politique énergique et suivie et qui, pratiqué de nouveau en 1870, n'a pas mieux réussi qu'en 1848 ; car l'unité de direction dans les grandes crises est une condition de salut. Les disputes inévitables de la majorité et de la minorité devaient conduire à la neutralisation des volontés, à l'impuissance qui naît de l'incohérence. C'est de cette maladie originelle qu'allait pâtir ce Gouvernement provisoire dont Proudhon a pu dire : « Il n'a pas su, voulu, osé. »
A peine constitué, il hésite à se qualifier, à s'engager sans retour. Républicain de fait, le sera-t-il de nom ? Osera-t-il devancer le vote de la nation sur un sujet de pareille importance ? Les témoins de ces heures troubles s'accordent à noter les scrupules et les tergiversations de Marie, de Garnier-Pagès, de Lamartine lui-même....
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