DAGUERRÉOTYPE
Table des matières On a donné le nom de daguerréotype au procédé de Daguerre, qui a été divulgué dans une séance de l'Académie des science du mois d'août 1839.
Cette publication, depuis longtemps annoncée, qui avait été précédée de l'exhibition d'épreuves de la plus grande beauté, représentant les objets naturels dans leurs moindres détails, produisit une grande sensation et inaugura tout à coup un art nouveau.
Ce procédé, établi sur les réactions les plus simples, donnait en effet des images où le dessin était rendu avec une perfection idéale défiant la main la plus habile, et il était déjà si complet, que chacun a dû s'étonner qu'il fût l'ouvre d'un seul homme.
Une feuille d'argent plaquée sur cuivre, ayant été polie le mieux possible, est soumise aux émanations de l'iode, qui, en se combinant avec l'argent, couvre sa surface d'une pellicule infiniment mince, d'un jaune d'or, qui est la couche photogénique placée au foyer de la chambre obscure; l'effet de la lumière a lieu, mais l'oil le plus exercé ne saurait en découvrir la trace: la couche parait intacte. En soumettant la plaque impressionnée à la vapeur du mercure, l'image parait comme par enchantement, et l'on peut s'assurer que le moindre objet qui a envoyé sa lumière à l'objectif s'y trouve dessiné dans ses moindres détails. Enfin, la plaque, après avoir été lavée dans une solution d'hyposulfite de soude qui dissout la couche d'iodure non impressionné, laisse un miroir d'argent sur lequel est déposé un enduit d'une délicatesse extrême; c'est l'image parfaite de tout les objets naturels compris dans le champ visuel de l'objectif.
Ces opérations en petit nombre, qui ont subi quelques additions depuis lors, forment l'objet des chapitres suivants.
Chambre obscure.
Table des matières Cet appareil se compose d'un objectif achromatique qui concentre ses rayons à travers une capacité rectangulaire sur un écran placé en arrière. Cette capacité rectangulaire est formée de deux parties s'emboitant l'une dans l'autre à frottement doux, l'une faisant corps avec l'objectif, et l'autre, pouvant se rapprocher plus ou moins de l'objectif, porte une rainure propre à recevoir soit une glace dépolie pour mettre l'image au point, soit la plaque préparée qu'on doit substituer à la glace dépolie.
En avant de l'objectif, on fixe un écran en drap doublé qui est destiné à démasquer l'objectif, et à régler l'accès de la lumière dans les meilleures conditions.
Pour tous les objectifs, le diaphragme destiné à réduire à volonté le faisceau lumineux doit être placé en avant de l'objectif et presque à le toucher, de manière à ne faire servir autant que possible que le centre de cet objectif; le diaphragme étant éloigné de l'objectif sans augmenter en rien la somme des rayons lumineux, donne une image moins nette, puisque tout l'objectif y concourt, et l'on sait que le foyer n'est pas le même pour ses bords que pour son centre.
Le diaphragme mobile est destiné à masquer le ciel et les lointains, de manière à obtenir sur les épreuves leur valeur vraie relative, qui exige cinq ou six fois moins de temps pour les produire... Ainsi, pour un paysage qui exigera vingt-cinq secondes en tout, on laissera l'objectif complétement découvert pendant quatre secondes, et aussitôt on abaissera l'écran au niveau de l'horizon, et on le balancera dans cette situation pendant les vingt et une secondes restant; c'est le seul moyen d'obtenir un ciel harmonieux et des loin tains purs.
En avant de l'objectif, il faut un prolongement cylindrique noirci, dont la longueur soit telle que l'angle compris par deux lignes tirées des bords du diaphragme aux bords de ce cylindre, et se croisant en avant, forment un angle égal à celui que comprend l'image dans sa plus grande étendue.
Pour les objectifs doubles, c'est autre chose. On doit les employer tels qu'ils sont construits, et, comme ils ne donnent de netteté que pour un seul plan, il faudra, en en mettant un au point, tenir compte de la correction du foyer chimique, ce qui n'existe pas pour des verres simples, qui donnent la même netteté pour des plans assez distancés les uns des autres.
Polissage des Plaques
Table des matières Les plaques qui servent au daguerréotype sont en doublé d'argent. Pour leur donner la planimétrie et la rigidité nécessaires pour cet usage, on est obligé, après le laminage, de les battre au marteau. Ce travail qui, par la multiplication des coups, représente en somme une pression considérable de beaucoup supérieure à l'effet d'un balancier, s'il s'agit d'une plaque normale, produit l'écrouissage de la plaque. Ce planage, quelque soin qu'on y apporte, rend la surface du plaqué très-impure; c'est pourquoi il est nécessaire de nettoyer à fond les plaques neuves, malgré l'apparence trompeuse de leur brillant.
Ce premier nettoyage doit être fait à l'huile avec du tripoli, au moyen d'un tampon de coton, d'abord en rond, pour croiser les traits et égaliser le travail, puis en travers pour finir. Ce premier travail est fini quand le tampon se trouve garni d'une pellicule grise semi-métallique, qui est de l'argent divisé arraché à la plaque. On assèche l'huile avec un nouveau tampon de coton, et l'on finit avec un troisième tampon après avoir de nouveau couvert la plaque de tripoli au moyen d'un nouet de mousseline qui le contient. Ce premier travail à l'huile est une bonne chose pour les plaques neuves et, à plus forte raison, pour les plaques fixées qui sont enduites d'une couche d'or; et pour celles-ci le tripoli est trop doux, c'est la potée d'émeri qu'il faut employer, en insistant beaucoup sur le travail, en rond promené partout et principalement vers les bords que l'on aurait tendance à négliger.
Les épreuves volantes, c'est-à-dire non fixées au sel dor, n'ont pas besoin d'être frottées à l'huile; on se contente de les travailler avec du tripoli imbibé d'eau et additionné d'esprit de vin et d'une faible quantité d'acide azotique. On se sert de ce nouveau liquide, comme on s'est servi d'huile, et ce nouveau travail s'applique à toutes les plaques: il enlève le gras aux plaques passées à l'huile et les traces de l'image aux épreuves volantes.
Autrefois, on se contentait, pour donner le dernier poli, de finir après le tripoli avec un tampon enduit de rouge en frottant en travers; cela suffira pour les personnes qui auront peu d'épreuves à faire. Il est plus expéditif, et le poli est plus parfait, de finir avec un rabot couvert de velours et garni de rouge d'une façon presque imperceptible, ce qui se pratique en étalant une pincée de ce rouge à polir sur toute sa surface, avec un tampon de flanelle roulé sur elle-même, qui ne sert qu'à cela.
Quand la plaque a passe par toutes ces phases, elle est prête à subir l'action de l'iode. En soufflant à sa surface, tandis qu'on lui fait refléter un endroit sombre, l'haleine condensée doit s'évaporer en laissant voir des nuances irisées, fugitives, mais sans inégalité : autrement le polissage ne serait pas satisfaisant, et il serait certain que l'image antérieure, soit volante, soit fixée, a laissé sa trace, qui ne manquerait pas d'apparaître et de se mêler à la nouvelle épreuve.
Iodage
Table des matières La plaque ayant été fixée sur sa planchette, est placée dans la botte à iode, qui se compose, en général, d'une petite caisse en bois dont le fonds est garni d'iode en grain recouvert de coton cardé ou d'une lame de molleton. Dans le principe, on se contentait de cette seule opération, et quand la plaque avait pris une nuance d'un jaune d'or pur, elle était prête à placer dans la chambre obscure.
Substances accélératrices.
Table des matières L'argent ainsi couvert d'une couche d'iodure est très-lent à s'impressionner; le perfectionnement le plus urgent consistait donc à augmenter la sensibilité. On y réussit bientôt au delà de toute espérance, par un procédé des plus simples qui consiste à faire succéder l'action du brome à celle de l'iode. Par ce moyen, la sensibilité fut je ne dirai pas doublée, ni décuplée, mais pour ainsi dire centuplée; ou plus exactement, on put substituer les secondes aux minutes. Cette sensibilité excessive résultait de la formation d'un bromo-iodure d'argent, et si, à la rigueur, l'emploi de l'eau bromée est peut-être ce qu'il y a de plus parfait, la difficulté de régler son emploi, en raison de la variation de la température, jointe à l'impossibilité d'en apercevoir l'effet sur la plaque, rendaient ce procédé difficile à pratiquer. Si bien que, pour ma part, ayant opéré sans relâche pendant plusieurs années, j'ai fait choix du bromure d'iode, qui permet d'arriver à la sensibilité maximum avec une plus grande certitude.
Forcé de me restreindre dans l'indication des méthodes pour ne pas sortir du cadre de mon livre, je me bornerai donc à indiquer la préparation et l'emploi du bromure d'iode qui, je le repète, épargne du temps et procure à coup sûr une excessive sensibilité.
Préparation du bromure d'iode.
Table des matières Dans un flacon d'un litre, aux deux tiers plein d'eau, on...