INTRODUCTION.
Table des matières 1.
Table des matières L'ÉQUITATION, ou l'art de monter à cheval, dit M. de Bohan, dans son Traité d'Équitation militaire ( Encyclopédie, page 264), nous enseigne et nous démontre la position que nous devons tenir sur un cheval pour y être avec le plus de sûreté et d'aisance. Il nous fournit en même temps les moyens de conduire le cheval avec la plus grande facilité, et d'obtenir de lui, de la manière la plus simple, et en le fatiguant le moins possible, l'obéissance la plus exacte et la plus parfaite, en tout ce que sa construction et ses forces peuvent lui permettre.
Il résulte de là que le cavalier est celui qui, solide et aisé sur l'animal, a acquis la connaissance de ce qu'il peut lui demander, et la pratique des meilleurs moyens pour le soumettre à l'obéissance.
Le cheval dressé ou mis, est celui qui connaît les intentions du cavalier au moindre mouvement, et y répond aussitôt avec justesse, légèreté et force.
Le développement de ces deux dernières définitions composera notre Traité d'Équitation. Notre but est de donner les moyens de devenir cavalier, comme aussi de démontrer ceux propres à corriger les vices d'un cheval, à perfectionner ses bonnes qualités, et arriver à le rendre obéissant et souple en ménageant ses forces, afin d'en obtenir le service qu'on est en droit d'attendre de lui quand il est bien conformé.
Les avantages de l'équitation s'étendent à toutes les| classes de la société ; c'est un exercice noble, susceptible d'entretenir la souplesse dans les membres, de les développer, de conserver la santé ; et il est d'une utilité particulière aux chasseurs, aux voyageurs, et sur-tout aux hommes d'épée. En général, tous les arts d'exercice offrent cet avantage; ils développent le physique, lui donnent de la grâce; mais les plus essentiels à un jeune homme bien né, et qui font partie de son éducation, sont l'art de faire des armes et celui de monter à cheval.
L'arme de la cavalerie doit toute sa force à l'équitation; en France, comme dans tous les pays où il y a une force militaire, elle est basée sur des principes méthodiques analogues aux mours, au goût et à l'adresse des habitans.;
Le talent de bien conduire de la cavalerie à la guerre, de l'instruire en temps de paix, demande des soins, de la pratique et de longues études.
Mais, pour en recueillir tous les fruits, il faut que le choix des chevaux soit fait avec un soin particulier, et que l'on reconnaisse dans chacun les proportions, la force et la souplesse nécessaires. Il est donc indispensable, pour y parvenir, que l'achat des chevaux de remonte soit fait par des officiers connaisseurs.
Mais ce qui n'est pas moins essentiel pour la cavalerie, c'est que ces chevaux soient ensuite dressés d'après de bons principes. L'État y gagnerait, ainsi que l'économie publique, parce que ces animaux ne seraient point usés par un travail forcé pendant leur éducation. Non-seulement ils taraient plus en état de faire campagne, ils dureraient plus long-temps, mais une bonne cavalerie, montée sur des chevaux sains et bien dressés, permettrait à MM. les généraux et colonels d'exécuter de vigoureuses charges; et les cavaliers, moins exposés sur de bons chevaux, n'éprouveraient pas autant de dégoût et de désagrémens. L'homme le plus brave et le plus intrépide est à demi-vaincu s'il est monté sur une rosse. Combien se rendent donc fautifs les officiers qui négligent d'apporter tous leurs soins et leurs connaissances dans les remontes des chevaux et dans l'art de les instruire! Ils manquent par-là le premier élément de la victoire. En effet, l'on sait qu'une charge faite à propos peut influer sur le gain d'une bataille.
Comme un cheval quelconque ne peut être bien dressé sans qu'au préalable on en ait étudié le caractère et reconnu les vices et les bonnes qualités, nous allons les définir, et indiquer le parti qu'on peut tirer des uns et des autres. Voyons ce qu'en disent M. de Garsault et autres auteurs qui ont bien traité cette partie.
Des qualités et des vices du Cheval.
Table des matières 2.
La connaissance du naturel d'un cheval est une des premières bases de l'art de le monter, et tout homme de cheval en doit faire sa principale étude. Cette connaissance ne vient qu'après une longue expérience, qui nous apprend à développer la source de la bonne ou de la mauvaise inclination de cet animal.
Quand la juste stature et la proportion des parties sont accompagnées d'une force liante, et qu'avec cela on trouve dans un cheval du courage, de la docilité et de la bonne volonté, on peut, avec ces qualités, mettre aisément en pratique les vrais principes de la bonne école Mais quand la nature est rebelle, et qu'on n'est point en état de découvrir d'où naît cette opiniâtreté, on court risque d'employer des moyens plus capables de produire des vices nouveaux, que de corriger ceux qu'on croit connaître.
Le manque de bonne volonté dans les chevaux procède ordinairement de deux causes: ou ce sones défauts extérieurs, ou des défauts intérieurs.
Par défauts extérieurs, on doit entendre la faiblesse des membres, soit naturelle, soit accidentelle, qui se rencontre aux reins, aux hanches, aux jarrets, aux jambes, aux pieds et à la vue. Comme nous avons détaillé tous ces défauts assez au long dans notre traité d'hippiatrique, nous ne les rapporterons point ici.
Les défauts intérieurs, qui forment précisée ment le caractère d'un cheval, sont la timidité, la lâcheté, la paresse, l'impatience, la colère et la malice, auxquelles on peut ajouter la mauvaise habitude.
Les chevaux timides sont ceux que l'on voit dans une continuelle crainte des aides et des châtimens, qt qui prennent ombrage au moindre mouvement du cavalier. Cette timidité naturelle ne produit qu'une obéissance incertaine, intérrompue, molle et tardive; et si on frappe trop ces sortes de chevaux, ils deviennent tout-à-fait ombrageux.
La lâcheté est un vice qui rend les chevaux poltrons et sans cour. On appelle communément ces sortes de chevaux, des rosses. Cette lâcheté avilit totalement un cheval, et le rend incapable d'aucune obéissance hardie et vigoureuse.
La paresse est le défaut de ceux qui sont mélancoliques, endormis, et, pour ainsi dire, hébêtés: il s'en trouve pourtant quelques-uns dont la force est engourdie par la roideur de leurs membres; en les réveillant avec des châtimens faits à propos, ils peuvent devenir de bons chevaux.
L'impatience est occasionée par le trop de sensibilité naturelle, qui rend un cheval plein d'ardeur, déterminé, fougueux, inquiet: il est difficile de donner à ces chevaux une allure réglée èt paisible, à cause de leur trop grande inquiétude, qui les tient dans une continuelle agitation, et le cavalier dans une assiette incommode.
Les chevaux colères sont ceux qui s'offensent des moindres châtimens, et qui sont vindicatifs; ces chevaux doivent être conduits avec plus de ménagemens que les autres; mais quand avec ce défaut ils sont fiers et hardis, et qu'on sait bien les prendre, on en tire meilleur parti que de ceux qui sont malicieux et poltrons.
La malice forme un autre défaut naturel: les chevaux attaqués de ce vice retiennent leur force par pure mauvaise volonté, et ne vont qu'à contre-cour. Il y en a quelques-uns qui font semblant d'obéir, comme vaincus et rendus, mais c'est pour échapper aux châtimens; sitôt qu'ils ont repris un peu de force et d'haleine, ils se défendent de plus belle.
Les mauvaises habitudes que contractent certains chevaux, ne viennent pas toujours de vices intérieurs, mais de la faute de ceux qui les ont d'abord mal montés; et quand ces mauvaises habitudes se sont enracinées, elles sont plus difficiles à corriger qu'une mauvaise disposition qui viendrait de nature.
Les différens vices que nous venons de définir sont la source de cinq défauts essentiels et d'une dangereuse conséquence; savoir, d'être ombrageux, vicieux, rétifs, ramingues ou entiers.
Le cheval ombrageux est celui qui s'effraye de quelque objet, et qui ne veut pas en approcher; cette appréhension, qui vient souvent de timidité naturelle, peut être causée aussi par quelque défaut de la vue, qui lui fait voir les choses autrement qu'elles ne sont; souvent encore, c'est pour avoir été trop battu; ce qui fait que la crainte des coups, jointe à celle de l'objet qui lui fait ombrage, lui accable la vigueur et le courage. Il y a d'autres chevaux qui, ayant été trop longtemps dans l'écurie, ont peur la première fois qu'ils sortent, et à qui tout cause des alarmes. Mais cette manie, quand elle ne vient pas d'autre cause, dure peu si on ne les bat point, et si on leur fait connaître avec patience ce qui leur fait peur.
Le cheval vicieux est celui qui, à force de coups, est devenu malin au point de mordre, de ruer et de haïr l'homme: ces défauts arrivent aux chevaux colères et vindicatifs, qui ont été battus mal-à-propos; car l'ignorance et la mauvaise humeur de certains cavaliers font plus de chevaux vicieux que la nature.
Le cheval rétif est celui qui retient ses forces par pure malice, et qui ne veut obéir à aucune aide, soit pour avancer, reculer ou tourner. Les uns sont devenus rétifs pour avoir été trop battus et contraints, les autres pour avoir été trop respectés par un cavalier qui les aura redoutés. Les chevaux chatouilleux, qui retiennent leurs...